R.A.P : Tu peux nous expliquer le titre de cet album 0.9 ?
Booba : C'est une comparaison entre la cocaïne et la musique. La cocaïne
pure, on appel ça de la 0.9. Elle est pure à 90%. Comme je parle
souvent de stupéfiants dans mes textes, 92 plaque tournante et tout
ça... C'était un peu l'idée.
R.A.P : 0.9, c'est aussi un morceau où tu fais référence à Martin Luther King et à Malcom X ...
Booba : Ouais, aux leaders noirs américains en général, à Nelson Mandela.
Parce que je parle de mon refus à l'intégration, ce qui colle un peu à
la condition des noirs, l'esclavage, L'apertheid... Le fait que je me
sente pas intégré, que je me sente pas chez moi, le racisme en
grandissant, c'est ce qui a fait de moi un marginal. Je me suis
toujours senti rejeté. Obligé d'en faire 3 fois plus que les autres ou
de courber le dos, c'est un truc que j 'ai pas réussi à faire et c'est
ça qui m'a mis en dehors de la société.
R.A.P : Tu veux dire que c'est difficile de trouver son identité quand on est métisse comme toi ?
Booba : C'est difficile quand t'es jeune. Mais après, une fois qu'on t'a
traité de sale noir un bon nombre de fois, tu sais où est ta place !
R.A.P : Pour revenir au disque, les guests ne sont pas ceux qu'on avait
annoncé. Il n'y a pas T-pain ou Lil' wayne, mais d'autres invités moins
connus. Pourquoi ?
Booba
: Je choisis mes guests surtout par rapport à mes connexions. Le
jamaïcain DeMarco, j'ai eu son contact par AnimalSons qui vont souvent
en
Jamaïque faire des prods. Rock City, c'est par rapport à Akon parce que
c'est des artistes de son label Konvict Music. Le reste, Mala, Brams,
Djé, c'est le 9.2i. Et Naadei, c'est une chanteuse de Montréal dont je
m'occupe. On prépare son album... Après il n'a jamais été vraiment
question d'un feat avec Lil'wayne. T-pain, j'aurais peut-être pu. Mais
c'était compliqué, faute de temps... Le reste, c'était que des
rumeurs...
R.A.P : T'as utilisé pas mal d'effets autotunes à la T-pain. C'est pas gênant de faire ça après lui ?
Booba
: C'est comme si tu demandais à T-pain si c'était génant d'arriver
après Roger Troutman (le chanteur de Zapp, présent sur California Love
de
2Pac et considéré comme l'un des maîtres incontestés du vocoder !)
T-pain n'a pas inventé le vocoder ! Moi, j'aime bien cette sonorité et
je le fais à ma manière. Ca t'ouvre d'autres possibilités musicales
parce que ça te permet de chanter. Sans ça, c'était hors de question
que je chante (rires) ! C'est pour ça aussi que même Kanye west est
tombé dedans (avec son nouveau morceau Love Lockdown). C'est un piège.
Parcr que si tu chantes juste, avec le vocoder tu peux être Mariah
Carey !
R.A.P : Y a toujours beaucoup de phases dans tes morceaux, c'est un peu ta marque de fabrique...
Booba : Ouais, c'est le rap. On l'oublie parce qu'on est en France, mais
l'essence du rap c'est la punchline, même quand tu fais un morceau à
thème. Quand les mecs prennent des gifles, c'est sur les punchlines...
R.A.P : Mais à force, t'as pas l'impression de tourner en rond ?
Booba : Bah j'tourne toujours en rond ! J'le dis de toute façon, j'parle
toujours des mêmes choses. Mais c'est le cas de tout le monde. Ils ont
beau faire des thèmes, c'est toujours les mêmes thèmes ! Moi, demain,
j'vais pas t'parler de gastronomie ou t'faire tout un texte sur le
réchauffement de la planète !
R.A.P : Sur Game
Over, tu dis : "je ne ferais pas l'album de trop..." Est-ce que tu t'es
posé la question avant d'enregistrer ce dique ?
Booba : Non, pas pour celui-là. J'suis pas encore vieux ! Mais ça fait un
moment, c'est vrai, que j'pense arrêter. Là, j'suis sur la fin. J'ai
bien entamé ma 2e phase, la 2e moitié de vie de Booba...
R.A.P : Et après, qu'est-ce qui va se passé ?
Booba : Je sais pas encore... Après j'bronze !!!
R.A.P : Y a eu ta pique sur Solaar, IAM et NTM que t'a traité "d'antiquités" dans B2OBA...
Booba : Ouais, et ça a bien énervé Didier Morville (Joey starr).
R.A.P : Du coup, il s'est pas gêné pour te répondre. Quand tu l'entends dire
que tu fais pas des concerts, mais des défilés de mode, t'en penses
quoi ?
Booba : J'en pense
qu'il est venu à mon concert (au Zénith de Paris) et qu'il sautait
comme un pantin ! Maintenant, s'il a quelque chose à me dire, je suis
prêt au dialogue. S'il est chaud devant la caméra, on verra s'il sera
aussi chaud quand il sera en face de moi... Après le côté défilé de
mode, peut-être qu'il trouve que j'ai du style et que je suis plus beau
que lui, j'en sais rien, peut-être qu'il m'a pris pour un mannequin...
R.A.P : Quand tu parles dans l'album des diamants sur ta montre ou du plasma
dans tes chiottes, t'as pas l'impression quand disant ça, tu vas encore
plus créé de jalousie ou de haine contre toi ?
Booba : J'men fous moi ! J'écris ce que j'ai envie d'écrire. J'pense pas à la
réaction des gens. Je suis moi-même, ce que j'écris sort de mon
cerveau, après les effets secondaires, le 2e effet Kiss Cool, ça me
regarde pas !
R.A.P : Le plasma dans les chiottes ça fait un peu nouveau riche. C'est un truc que t'assumes ?
Booba : Ouais, d'ailleurs, je le dis dans le même morceau (R.A.S) "Nouveau
riche, je n'ai jamais eu honte, j'ai pleuré de la fonte, rendez-vous en
Suisse bâtard, si tu veux me régler mon compte !" Etre un nouveau riche,
ça me gêne pas. C'est comme si j'avais gagné au loto, enfin avec un peu
moins d'argent...
R.A.P : Mais souvent les nouveaux riches ne savent pas quoi faire de leurs thunes. C'est ton cas ?
Booba : Y a un peu de gaspillage, mais j'perds pas mes valeurs. J'garde la
tête froide et j'aide quand même mes proches. Maintenant, faut se faire
plaisir aussi dans des futilités. Quand c'est des trucs que t'a jamais
eu avant, ça fait plaisir. Quand du jour au lendemain tu l'achètes une Bentley...
R.A.P : Tu dis aussi : "J'suis pas dans le bling bling, enculé, j'suis diamantaire..."
Booba : Ouais, parce que bling bling aujourd'hui c'est péjoratif. et puis ça
veut rien dire en vérité, bling bling, surtout quand on parle de
beaucoup de carats et de vrais diamants. En plus, j'fais des bijoux
avec Tony Blings. C'est pour ça aussi que je dis ça...
R.A.P : Dans Bad boy street, tu déclares : "Réfléchir avant d'agir, c'est vrai, je devrais m'y mettre..."
Booba : Ouais, parce que, des fois, je suis trop impulsif !
R.A.P : Comme à Urban peace 2 ?
Booba : (Rires) Ouais !
R.A.P : Sur ton nouveau single, Illegal, t'as des paroles qui pourraient
choquer quand tu lâches dès le début : "je me lave le pénis à l'eau
bénite..."
Booba : (Rires)
C'est pour signer mon retour ça ! C'est parce que je suis pas
religieux. Pour moi, les religions, quelles qu'elles soient, c'est
beaucoup de prétextes pour faire la guerre et diviser les gens pour
mieux régner. Moi j'suis un être humain, un citoyen universel et
j'prends tout le monde pareil, j'respecte pas les gens pour leur
religion...
R.A.P : Dans Soldats, tu parles de
l'absence de ton daron. C'est plutôt rare de t'entendre là-dessus. Tu
parles plus de ta mère en général...
Booba : Ouais, là j'dis juste : "le daron n'était pas là, je le pardonne."
Cette abscence ne m'a pas dérangé parce que j'ai toujours vécu qu'avec
ma mère. J'ai pas connu la phase des enfants traumatisés quand leurs
parents divorcent. Moi, c'était déjà cuit avant, donc j'ai grandi comme
ça et puis c'est tout !
Je connais mon père, mais mes parents
étaient déjà séparés quand je suis né. Ca m'a pas empêché de le voir de
temps en temps. Bon, ils m'emenaient pas à mes matchs de foot quoi
(rires) ! Mais je lui en veux pas. J'me dit : moi, j'suis un homme et
j'sais pas si demain j'irais pas faire la même ! On n'est pas à l'abri,
rester avec la même femme toute sa vie, c'est pas forcément évident...
R.A.P : Le king n'a pas encore trouvé sa queen ?
Booba : Non. Pas la vraie !
R.A.P : A un moment, il était question que ton album sorte en même temps que
celui de Rohff. Tu en avais fait l'annonce. Ca aurait été une bonne
chose ?
Booba : Ouais, ça
aurait été intéressant, j'pense. Ca aurait été marrant, ça aurait fait
du buzz, ça aurait fait parler même au-delà de la presse spécialisée.
Ca aurait été comme si y avait eu un NTM-IAM à l'époque. Et quand ils
ont fait ça aux States avec Fifty et Kanye West, ça avait fait du
bruit. C'est positif, c'est comme du sport...
R.A.P : Ca peut aussi déraper quand la concurrence est poussée à l'extrême...
Booba : Non, j'vois pas pourquoi ça déraperait. Y a pas de clash. C'est juste
2 albums qui sortent en même temps. C'est comme un match de foot. tu
gagnes, t'es content, tu perds t'es dégouté, c'est tout. Et après, tu
rejoues le prochain match...
R.A.P : Pour finir, t'as prévu une tournée ?
Booba : Ouais, sûrement en 2009. Bercy, le stade de France, on verra comment l'album marche...
R.A.P : T'as d'autres choses à annoncer ?
Booba : La nouvelle collection Unküt pour cet hiver et l'album de Mala,
Himalaya, qui sortira début 2009. Il l'a réalisé avec Marco
d'AnimalSons et je serais aussi en featuring dessus...
FIN